Interview de Christian Pigeon
secrétaire fédéral de SUD PTT
Article mis en ligne le 3 juillet 2015

par Universite Populaire Toulouse

Il est trop tôt pour mesurer les conséquences de la rupture programmée entre Orange et l’opérateur Israélien Partner. Il est probable cependant, compte tenu du poids de Orange à l’échelle de la planète, que nous puissions assister à un effet domino. Des militant e s de part le monde qui engage des campagnes pour mettre un terme aux relations avec l’état colonisateur. Nous avons interroge Christian PIGEON secrétaire fédéral de SUD PTT et délégué syndical central. Il nous a paru utile de donner quelques documents en fichier joint pour comprendre comment un syndicat mène une campagne sur un sujet qui n’est pas directement lié à la défense des intérêts immédiats des salariés.

Si on en croit le communiqué de Solidaires publié ce jour, nous sommes enfin devant une rupture programmée du contrat autorisant Partner à utiliser la marque Orange, mais pas encore dans la situation d’une rupture définitive avec Partner. Au lendemain du 1er communiqué de Orange avec la montée au créneau du 1er ministre israélien Netanyahu et les tergiversations du gouvernement français…on a craint encore une reculade. On peut imaginer ce qui s’est passé en coulisse ?

Pour notre part, nous étions convaincus que la direction de la multinationale évoluerait le jour où elle penserait que cela lui couterait plus cher de maintenir ce contrat plutôt que de le rompre... donc les discussions entre financiers se sont poursuivies

La combinaison de l’intervention syndicale, SUD-CGT, au sein du groupe Orange, la campagne BDS qui exaspère le gouvernement israélien, auquel il faut ajouter le travail de bon nombre d’ONG concrétisé par le rapport commun syndicats-ONG a payé puisqu’il met à l’ordre du jour une rupture entre Orange et Partner. L’activité dans les instances d’Orange, Comité d’ Entreprise, pour l’essentiel et l’intervention sur bien des sites dont Blagnac a donc été d’une grande utilité ?

La campagne BDS, la publication du rapport Orange, les interventions répétées des syndicats d’orange Cgt et Sud n’ont pas fait qu’exaspérer le gouvernement Israélien, cela a également énerve le PDG qui comme les autres entend faire des affaires en paix... surtout quand il s’agit d’une entreprise de communications. En lien avec les ONG et BDF, les nombreuses interventions de Sud dans les instances du groupe, ses tracts, l’impression à 21000 exemplaires de la carte postale de BDS... tout ceci a contribué à la rupture d’un contrat commercial alors que les patrons sont toujours soucieux de discrétion dans leurs affaires.  

En même temps on sait que la présence d’Orange, en Tunisie et surtout en Egypte a sans aucun doute pesé lourd dans les choix stratégiques d’Orange. Le mouvement social dans ces pays s’est-il emparé de cette question ? Sous quelle forme ?

Évidemment, la menace d’un boycott en Égypte de la filiale Mobilnil qui demain doit s’appeler Orange a du emporter les derniers doutes et ce n’est pas un hasard si S Richard a fait sa première déclaration depuis Le Caire 

Israël Palestine fait partie des sujets clivant, y a-t-il eu parmi le personnel, les équipes syndicales des personnes qui ont considéré que les syndicats sortaient de leur rôle ? Comment les équipes syndicales, quand on fonctionne à l’échelle d’un groupe mondial, intègrent dans leur démarche syndicale la question de la solidarité internationale au XXI ième siècle ?

En effet, c’est un sujet chaud et on a eu la surprise de voir des réactions plus violentes que celle de la direction dans certaines instances. Cela dit, Sud qui est un syndicat qui rassemble de nombreux salarié-e s n’est pas à l’abri de certaines réactions en France. N’empêche, les valeurs de solidarité internationale sont dans l’ADN de Solidaires Unitaires et Démocratiques. il nous faut faire preuve de pédagogie mais dans notre multinationale, nous avons toujours avancé des revendications à l’échelle de toutes celles et ceux qui font la richesse de la l’entreprise.

La bataille contre l’accord Orange-Partner s’inscrit dans une démarche dont l’objectif est d’aboutir à une paix juste et durable entre palestinien-ne-s et israélien-ne-s. Elle est sans aucun doute d’une grande importance, car cela peut convaincre des équipes de se mettre au travail pour faire cesser des accords impliquant des groupes industriels, des collectivités territoriales…Comment allez-vous populariser ce qui est en train de se passer, au-delà du communiqué ?

Il faut avouer que ce combat n’est pas la priorité de nos activités. Nous avons déjà beaucoup à faire pour gagner un autre partage des richesses produites par Orange et il nous faut également convaincre qu’un syndicalisme de transformation sociale est un outil efficace pour les salarié-es à un moment où la pensée unique encourage tous les individualismes. Cette victoire, même si elle n’est pas encore entrée dans les faits, nous en partagerons les leçons avec tous les collectifs qui ont participé à la campagne. Pour ce qui est des salarié-es d’Orange, nous les informerons de notre satisfactions par nos moyens de diffusion habituels : tracts, affiches, push mail... journaux

Il faut se garder de toute comparaison mais la rupture entre Orange et Partner, a-t-elle le même sens, voire la même portée que ce que l’on a connu avec les oranges Outspan d’Afrique du Sud ?

Orange n’est pas l’agrume qui était boycotté mais la comparaison est d’actualité puisque ce qui a inspiré l’initiative du collectif BDS est la campagne anti apartheid. Cependant, on peut espérer que la crainte d’un boycott ou de sanctions pèsera sur les relations économiques d’Israël et par ricochet sur la politique des gouvernements jusqu’à obtenir une paix juste et durable entre israelien-nes et palestinien-nes

Les communiqués rendus publics après la décision de Orange et le dernier tract diffusé par le Collectif Solidarité Palestine 31 sur le site Orange de Blagnac.