Conférence -débat : L’impasse de la situation politique italienne après les dernières législatives : catastrophe ou bonne nouvelle ?
Article mis en ligne le 3 mars 2013

par Universite Populaire Toulouse

L’Université Populaire de Toulouse invite Phillipe Foro le mardi 12 mars à 20H30, pour une conférence -débat autour des élections italiennes.

Philippe FORO est Maître de conférences, au sein du département d’Histoire de l’UTM Mirail, Membre de l’équipe E.R.A.S.M.E.

Dernières publications :
 Histoire de l’Italie contemporaine.
 Histoire de la réception de l’Antiquité dans l’Europe des XIXe et XXe siècles.
 Histoire des relations internationales (XIXe-XXe siècles).

 Philippe Foro, L’Italie fasciste, Paris, A. Colin, 2006.
 Alberto Bianco et Philippe Foro, L’Italie de Mussolini à Berlusconi, Toulouse, éd. Milan, 2005.
 Philippe Foro, Les transitions italiennes, Paris, L’Harmattan, 2004.

L’impasse de la situation politique italienne après les dernières législatives : catastrophe ou bonne nouvelle ?

L’Italie ingouvernable pour la presse transalpine :

Les journaux italiens s’inquiètent tous, de l’impasse politique dans laquelle le pays se trouve plongé.

  • Le « Corriere della Sera » parle d’un « vote choc ». Dans son éditorial du mardi 26, le journal de centre droit évoque « la victoire d’une Italie eurosceptique face à la politique de rigueur économique ».
  • La « Repubblica » évoque une « Italie ingouvernable », opposant « la forte remontée de Berlusconi » au « flop de Monti ». Le journal décrit « l’arrière-goût amer d’une victoire quasi symbolique de la gauche, qui l’emporte grâce à une poignée de voix et n’est pas autosuffisante au Sénat, même avec l’inutile béquille de Monti (...). Les populismes ont prévalu ».
  • « La Stampa » évoque quant à elle « un parlement bloqué ». « L’Italie réelle a exprimé tout son malaise. Avec ce vote, on entend les voix et histoires de ceux qui ne trouvent pas de travail, ne bouclent pas les fins de mois avec leur retraite, pensent ne pas avoir d’avenir et s’enfuient à l’étranger, et de ceux qui ont vu les nouveaux impôts comme une insupportable vexation. (Les parlementaires de Grillo) doivent être traités comme une ressource, pas comme des ennemis »

Plus amer encore, le blog de Luisa betti -http://blog.ilmanifesto.it/antiviolenza/ - dénonce la myopie de la gauche, sa "surdité, sa défaillance, son incapacité" même à tirer profit d’une "société civile, riche d’expérience et de créativités de personnes capables" mais reléguée à des "espaces d’écoute politique", démontrant ainsi "un snobisme intolérable face à la souffrance et l’injustice sociale toujours plus douloureuse". "Une gauche qui devrait faire une sérieuse auto-analyse parce que c’est elle qui nous a offert Grillo, et qui a remis en selle Berlusconi, après nous avoir fait passé Monti, pour le "mal mineur"". Et elle ajoute : "il y a un espace vide que le mouvement 5 étoiles occupe pour le laisser vide". Alors que le reste de l’Europe a connu des mouvements anti-austérité et anti-libéralisme, "chez nous, une grosse part "d’indignation" a été interceptée et organisée par Grillo et Casaleggio - deux riches sexagénaires provenant des industries du spectacle et du marketing - (...) dans un "mouvement" rigidement contrôlé et mobilisé par un sommet qui ramasse et propose des revendications et des mots d’ordre du mouvement social, mais les mélange avec l’apologie du capitalisme "sain" et les discours superficiels centrés sur l’honnêteté du seul politique/administrateur". "L’unique manière de savoir lire la phase qui s’ouvre est de comprendre le rôle joué par Grillo et Casaleggio dans la phase qui se termine. Pour beaucoup, ils se sont comportés comme des incendiaires. Pour nous, ils ont rempli la fonction de pompiers".

Les tenants d’une Europe libérale, où ont été engagés quarante plans d’austérité en cinq ans, voient à nouveau le suffrage universel déjouer leurs plans. Faut il s’incliner devant la dépouille de Mario Monti, passé sous le laminoir électoral se plaindre de tous ces experts-ministres congédiés par un peuple ?

Le score de Beppe Grillo participe t- il d’un mouvement général de la montée du populisme en Europe ou faut-il y voir avant tout un rejet puissant de l’austérité de l’ Europe libérale ?

L’Italie serait donc ingouvernable par la faute d’un peuple irresponsable qui place Monti derrière Berlusconi, C’est un cinglant désaveu pour le gouvernement « technique » de Mario Monti. Sans doute grisés d’avoir pu imposer aux Grecs Lukas Papadémos, ancien vice-président de la BCE, Angela Merkel et Nicolas Sarkozy avaient ensuite propulsé Mario Monti, ancien Commissaire européen et conseiller de Goldman Sachs, afin qu’il mette en œuvre l’austérité en Italie. Aujourd’hui il ne récolte que 10% des suffrages.

L’échec de Mario Monti n’est pas seulement celui d’un gouvernement libéral ,c’est celui de la réalité de la crise sociale provoquée par les mesures d’austérité, et c’est aussi celui du « trait d’union » entre les classes dirigeantes européennes.

Est-il aussi celui de François Hollande ?