Retour sur le long conflit des facteurs et factrices de Aspet et Saint Gaudens
Article mis en ligne le 8 novembre 2017

par Marsanay

Nous avons interrogé Michel Roda et Loïc Graule militants de Sud PTT 31. Un conflit long coûte cher, on le sait. C’est aujourd’hui un argument essentiel pour expliquer les difficultés à rentrer en grève contre la loi travail. Il faut donc lire attentivement ce que l’on peut négocier à la sortie d’un tel conflit en ayant toujours en tête que seul le rapport de force permet une négociation sur les jours de grèves. Mais pour cela il faut commencer par se mettre en grève.

1- Comment a débuté la grève Aspet extension à Saint Gaudens ?
Les collègues d’Aspet ont appelé les OS pour déposer un préavis dans le cadre de la réorganisation qui se dessinait. FO a refusé au motif officiel que c’était un préavis pour le 21 septembre, jour de grève national pour lequel leurs OS n’appelaient pas.
Ils n’ont pas rejoint le conflit pour autant. La CGT (reconductible) et SUD (illimité) ont déposé un préavis pour les collègues d’ASPET. Avant la manifestation les collègues d’Aspet ont vu les collègues de St Gaudens qui avaient prévu la grève à partir du 27 septembre.
Effectivement le projet de la direction concernait des évolutions qui allaient avoir des incidences sur les 2 sites.Pour la petite histoire, et surtout comprendre le décalage, il faut remonter 2 ans avant. St Gaudens lors de la première phase de ce projet était parti en grève SEUL. (Les copines d ’Aspet n’avaient pas suivi)

2-Quelles étaient les revendications
Les 2 préavis sont du même acabit même si le préavis CGT de St Gaudens tourne aussi sur la prise en compte du travail réel au lieu du travail prescrit.
La direction veut que des facteurs préparent le courrier et d’autres le distribuent. Schématiquement, cela réduit le nombre de véhicules et réduit les surfaces immobilières. Au delà de cette pure logique, cela réduit la présence postale et déshumanise le métier. Cela a bien sûr de grosses incidences sur le temps passé en travaux extérieurs pour les distributeurs de courrier qui se retrouvent dehors 6/7 j durant 5h30/6h par jour.
En agissant ainsi la direction supprime des liaisons camions et les remplace par des liaisons en fourgon (ou voiture), mais aussi le traitement des courriers recommandés, des colis, des réexpéditions,... toutes ces opérations se font sur le site principal sans augmenter les effectifs. Il faut noter que les facteurs guichetiers, n’étaient pas en grève, cela signifie que ce "nouveau" métier, s’accompagnant d’une promotion, leur laissait croire qu’ils grimpaient dans la hiérarchie et que cela était incompatible avec la grève, voire risquait de remettre en cause leur évolution de carrière.
Ça marche !
Donc les principales revendications étaient :
A ) retour du Tri du courrier par quartier à Aspet (qui avait été la première phase réalisée 2 ans auparavant) cette revendication permettait
1 de maintenir la préparation des tournées à Aspet par les facteurs d’Aspet puisque c’est cette 2ème phase d’évolution que la poste souhaitait mettre en place.
2 de garder des horaires qui n’incluaient pas une prise de service à 10h avec une fin de service à 17h
Cette revendication permettait de ne pas détériorer les conditions de travail, mais aussi le service à rendre aux usagers (tant en terme d’horaires que de qualité de service)
B ) garder un régime de travail avec des jours de repos autour du WE (dans son projet les collègues n’avaient jamais de samedis libres)

3-Comment était organisée la grève, les liens entre Aspet et Saint Gaudens.
Dès que St Gaudens est rentré dans le mouvement les rassemblements quotidiens se sont passés à St Gaudens à quelques exceptions près (marché de Aspet et rendez vous à la mairie). En effet, 3 fois par semaine (en moyenne) la direction Toulousaine "descendait" à St gaudens pour négocier. Comme le projet était global les liens étaient assez faciles à tenir et la direction n’a pas pu dissocier les collègues.

4-Comment la population a réagi à ce long conflit : soutien, aide...?
La présence d’un piquet de grève quotidien avec barnum, drapeau, sono, ... a permis de distribuer des tracts et d’avoir des soutiens au quotidien. Comme dans "tout conflit long", le début a été facile et la fin plus compliquée. La direction envoyait des cowboys de Toulouse pour distribuer le courrier et dormir à l’hôtel. Les cadres et cadres SUP étaient également sollicités.Le volume de courrier qui a été passé par cette équipe de choc + les CDDs et NON-grévistes (50%) a permis à la poste de donner illusion.
Malgré tout la Qualité de service était déplorable.Il y a une pétition qui a été signée par + de 2000 usagers et la caisse de grève (gérée par la CGT) a permis de récupérer près de 10 K €
L’UL CGT a été présente sur toute la durée du conflit et le soutien des sections locales présentes a été un vrai réconfort pour nos collègues.

5-Qu’ont obtenu les facteurs et les factrices ?
lire ici

6- On entend aujourd’hui ici et là qu’il est difficile de faire grève parce que ça coûte cher , comment on fait grève pendant un mois ?
Très difficile à appréhender en amont. Nous avons pu rassurer les collègues sur le "coût réel" de la grève qui a pu être réduit lors de la négociation de reprise cela laisse entendre que la grève ne s’effrite pas et que l’on obtient des grévistes une cohésion collective jusqu’au bout.
Dans le cas présent, grâce à la négociation il y a eu neutralisation des jours de RTT, temps partiel et JNT.Ensuite nous avons obtenu jusqu’à 4 jours neutralisés pour la négociation et jusqu’à 3 jours pour rattraper le travail en retard ; donc les collègues qui avaient le + de jours sont tombés de 30 jours à 24 puis à 17 jours. Pour ne pas perdre les dimanches bêtement, nous avions conseillé aux collègues d’Aspet de reprendre soit les samedis, soit les lundis.
Si on ajoute les 10K € qu’ils vont se répartir au prorata du nombre de jours de grève et le fait qu’ils peuvent étaler les jours de grève restants, cela rend les choses + digestes.
Il n’est pas certain que ce schéma puisse se reproduire dans toutes les entreprises mais la force des facteurs reste la difficulté et la technicité de leur métier