La question de l’institutionnalisation du syndicalisme est aussi ancienne que le syndicalisme lui-même. Cette assertion se vérifie partout et à tout moment. En France, elle est d’autant plus vraie que l’Etat y occupe une place prépondérante et ne s’est résolu à admettre l’existence de contre-pouvoirs, à la fin du XIXème siècle, que dans l’optique d’en faire des supplétifs de l’ordre dominant.
Dans l’univers syndical, cette problématique connaît aujourd’hui un regain d’intérêt. Il faut dire que les représentants du salariat sont plus que jamais incorporés dans les processus qui les orientent à dessein vers une gestion bureaucratisée des relations sociales et un accompagnement des réformes, tout en les éloignant des formes conflictuelles de l’action revendicative. Au fond, l’objectif de l’institutionnalisation poursuivi par le champ politique a constamment consisté à substituer à une logique de contestation une logique d’intégration.
A l’heure où la majorité présidentielle bouleverse le code du travail en mettant en scène les apparences d’une négociation sous les ors de la république, il s’agit ici de nourrir une réflexion critique sur les enjeux de longue durée de cette institutionnalisation.